A Julie
Ici, tout autour partent de petits chemins du temps d’avant. Sur certains d’entre eux, aujourd’hui, on a fait des routes. Des routes pour les vivants d’aujourd’hui, des routes qui mènent on ne sait où, mais qui mènent ailleurs.
Sur une de ces routes, je la vois passer souvent, sur son vélo, elle descend vers la mer, ou vers la ville, je ne sais jamais, je ne la suis que du regard.
Mon regard se perd, quand elle disparaît, au détour d’un virage, là-bas dans la descente.
Je n’attends pas son retour, je ne la guette pas, elle passe aux heures douces du matin, quand le soleil n’est pas encore trop haut, trop chaud, quand je peux profiter d’encore un peu de fraîcheur sous la tonnelle, et que la lumière joue ses arabesques tendres avant de faire plisser les yeux.
Plus tard, c’est à mon tour de prendre ce chemin. Descendre vers la ville, retrouver mes murs encombrés de vieux papiers, de livres et de tout ce qui peut se lire..
Il fait frais dans l’ombre du papier.
J’arrive souvent trop tôt, j’ouvre malgré tout la porte même si personne n’entrera avant un long moment.
Je me perds dans les pages ouvertes au hasard, et la vie passe autour de moi, sans que je la vois, noyée dans la poussière des vieux livres.
La vie se fuit de moi.
Je ne relève la tête que quand un client entre ou me demande quelque chose, mais c’est si rare que je peux vagabonder tranquillement des journées entières parmi les mots
Ou, les mains vides, par les espaces de la vitrine, je regarde le dehors. Les saisons, le ciel, la mer..
Et le vent.
Et elle est entrée, elle a posé son vélo sur le mur, à l’instant ou je regardais le vide de la rue.
Les jambes. Les pieds. Le déhanchement léger, involontaire qui atteint tout le corps.
Elle entre et d’abord il y a le clignement des yeux qui cherchent la lumière, après l’éblouissement du dehors.
Elle regarde sans voir, comme dans un affolement ravi face à tous ces livres.
Disparaît de mon regard derrière un rayonnage.
Je la laisse chercher, je m’installe derrière le vieux bureau, un livre dans les mains pour me donner une contenance.
J’écoute ses pas, les livres qu’elle déplace, cherchant à deviner lequel trouvera ses faveurs.
Elle a posé ses livres sur le bureau, sorti quelques pièces de son porte monnaie et dans un grand sourire s’est empressée de reprendre son chemin.
Demain, quand je la verrai descendre vers la plage, dans son regard se dessinera la trace des mots qu’elle aura lus ..
Et j’attendrai ici, qu’elle revienne.Olivier
Commentaires :
Une carte postale.
Les bouquinistes
Le vélo.
Ca fait beaucoup d'indices non.. ?
Sourires..
Bien sûr que c'est pour vous..
Olivier
Je pourrais répondre.. "de rien"..
Il faudrait plutôt répondre.. "de tout"..
Des Sourires.. beaucoup.
Vendredi